14 février 2009

120. Ashby : Harold and Maude

1001 films de Schneider : Harold and Maude


Film américain réalisé en 1971 par Hal Ashby
Avec Ruth Gordon, Bud Cort

Plein d'appréhensions avant de revoir ce film enterré depuis longtemps dans ma mémoire de cinéphile. Disons que l'affiche "flower power style" n'annonçait rien de bon, pour moi, qui n'ai aucunement la nostalgie de cette période à la réputation largement surfaite. Cette période, c'était mon adolescence, et comme disait Paul Nizan (qui n'a vraiment rien à voir avec le cinéma ) dans son célèbre ouvrage Aden Arabie:
« J'avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c'est le plus bel âge de la vie. »

Mais, surprise, beaucoup de plaisir à revoir cette improbable histoire d'amour entre cette mémée shootée à l'EPO (ou tout simplement souffrant de démence sénile, selon le point de vue) et ce freluquet, amateur de suicides. On nous rejoue Love Story façon Six Feet Under avec le cirage mélodique de Cat Stevens (Yusuf Islam depuis 1978) comme toile de fond. 

En fait, l'utilisation de chansons pour enchaîner les séquences et faire du "métrage" est une reproduction presqu'à l'identique de ce qu'a fait Mike Nichols dans son Graduate, quatre ans auparavant, avec les chansons de Simon and Garfunkel. Technique que nous reverrons des milliers de fois dans beaucoup de comédies romantiques depuis cette époque et pendant les 150 prochaines années.

Amusant, sans plus. N'y cherchez surtout pas une critique percutante de la société américaine à l'ère Nixon comme plusieurs critiques de l'époque tentaient de nous faire croire. Le succès du film, à sa sortie, tenait plus à l'immoralité de la relation entre un adolescent et une grand-mère qu'à sa critique sociale; la suprématie des fleurs sur les militaires, c'était déjà d'un "ringard" !

La Volkswagen Beetle bleue poudre de Maud : c'est la réplique de ma première voiture, achetée d'occasion. Elle avait plus de 120 000 km au compteur et probablement beaucoup plus sous le capot parce qu'un piston a cramé quelques mois après son acquisition. Heureusement, j'ai pu la vendre à deux étudiants sans le sou qui débarquaient du Laos et qui parlaient à peine le français. Pas fier, mais vendue quand même. J'étais jeune et ma sensibilité au tiers-monde partait vraiment du mauvais pied. Heureusement, quelques années plus tard, j'allais être emporté intellectuellement par le courant tiersmondiste, fer de lance de la gauche occidentale dans son combat contre le néo-colonialisme et l'impérialisme. C'est pas beau ça !

Lecture cinéphilique
Godard et la société française des années 1960 de Jean-Pierre Esquenazi.
Enfin terminé. C'était un dernier effort pour me réconcilier avec Godard que j'ai toujours détesté, hormis quelques séquences dans quelques films et, évidemment, À bout de souffle. Ce livre m'a impressionné par son accessibilité, par sa clarté, par sa démarche structurée et hautement pédagogique. Œuvre rare dans le milieu de la cinéphilie qui traite de cette époque.

Ce livre ne m'a pas appris à aimer Godard, il m'a juste expliqué pourquoi je détestais son œuvre et je l'en remercie.

Une des démarches du livre est de décrire et d'expliquer la répudiation par Godard de la culture industrielle (la culture populaire) auquel il adhérait au début de sa carrière et son passage à la culture classique (celle de la future élite de gauche) qui réagit fortement à toutes les productions culturelles adoptées par la majorité de la population qui, évidemment, est décrétée aliénée par cette élite condescendante. C'est ce qu'on appelait en langage marxiste, l'avant-garde du prolétariat. Interdit de rire.

Que je n'aime pas le cinéma de Godard et encore moins le personnage public, carrément imbuvable, ne m'empêche pas de penser que sa démarche artistique fut une des plus importantes de toute l'histoire du cinéma. Il fallait Godard.

Visionné, la première fois, le 29 février 1976 au cinéma Outremont à Montréal
Mon 120ème film visionné des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 1er février 2023