27 décembre 2007

65. Costa-Gavras : Z

1001 films de Schneider : Z



Film franco-algérien réalisé en 1969 par Constantin Costa-Gavras
Une équipe de production de rêve :
Avec Yves Montand, Irène Papas, Jean-Louis Trintignant, Jacques Perrin, Charles Denner, François Perrier, Bernard Fresson, Pierre Dux, Magali Noël, Renato Salvatori, Marcel Bozzuffi.
Scénario : Jorge Semprun tiré du roman éponyme de Vassilis Vassilikos.
Caméra : Raoul Coutard
Musique : Mikis Theodorakis

Sujet : L'assassinat de Grigoris Lambrakis, député grec.

Grigoris Lambrakis (1913-1963), fut élu au parlement grec en 1961 sous une bannière de gauche. Il a été activement impliqué dans les mouvements pacifistes pour le désarmement nucléaire et pour le démantèlement des bases militaires américaines en Grèce. Sa vie fut souvent menacée à cause de ses déclarations pacifistes. Son assassinat et l'enquête qui s'ensuivit sont fidèlement racontés dans le roman de Vassilikos et le film de Costa-Gavras.
Grigoris Lambrakis, pendant une marche (de Marathon à Athènes) pour la paix, interdite par les autorités, un mois avant son assassinat le 22 mai 1963 à Salonique

Comment évaluer ce film? Ambivalence certaine.

Pour. À l'époque, je n'ai eu aucun doute. Film politique majeur qui traite enfin des atteintes aux libertés fondamentales dans les régimes démocratiques. Ce film avait une valeur universelle; ce qui s'était passé en Grèce en 1963 lors de l'assassinat de Grigoris Lambrakis pouvait se passer dans une démocratie près de chez-nous et se passait régulièrement dans nombre de pays d'Amérique latine.

J'avais été secoué émotionnellement par ce film. Je me souviens que, pendant des jours, il fut au cœur de mes conversations et il participa à maintenir ma ferveur dans mes positions politiques : contre les Américains au Vietnam, contre l'impérialisme américain en Amérique latine, pour toutes les luttes syndicales, pour l'indépendance du Québec et, à la limite, pour les moyens violents d'y arriver.

         Troublant.

Pendant que je rédige ce message, j'apprends l'assassinat de l'ex-première ministre du Pakistan, Benazir Bhutto, dans des circonstances qui rappellent l'élimination de Grigoris Lambrakis; c'est-à-dire qu'elle a, probablement, été assassinée par un groupe d'extrême-droite (islamistes fondamentalistes) avec le soutien de certains éléments de l'armée pakistanaise.
Contre. Ce qui est agaçant dans ce film qui se veut politique c'est justement qu'il dépolitise cet assassinat en ne s'attardant qu'au strict déroulement de l'enquête judiciaire sans mise en contexte. Cet assassinat a eu des répercussions énormes sur la société civile mais le réalisateur décide d'ignorer tout cet aspect. Il préfère montrer l'histoire de la victoire éphémère des forces du bien (le jeune procureur,Trintignant, le journaliste, Perrin) contre les forces du mal (la police et les militaires).

Ce qui est agaçant également :
Son côté tape-à-l'oeil. Exemple : Perrin et sa superbe Nikon automatique, l'aura-t-on vu celle-là!!!, à croire que Nikon a commandité ce film. Champion du placement de produit.

Les "méchants" ont l'air de sortir d'une mauvaise bande dessinée : la scène de l'inculpation des militaires; la scène de l'hôpital où l'on voit un type, une jambe dans le plâtre, se baladant avec un gourdin pour assommer un pauvre type qui a un sac de glace sur la tête. Ces scènes hilares et grotesques sont à contretemps avec la gravité du sujet abordé. Je pourrais multiplier les exemples de ce type de scènes.

Mais basta la critique et passons à cette partie de mes messages qui me passionne plus, celle qui traite d'éléments réels liés à la fiction du film.

On retrouve dans le film le fameux symbole de la paix, le fameux "Peace" qui représentait la lutte pour le désarmement nucléaire. Il devint, par la suite, l'emblème de tout le mouvement de la contreculture de la fin des années 1960.
Ce symbole a été élaboré en 1958 par Gerald Holtom, un designer britannique, suite à une commande du CND (Campaign for Nuclear Disarmament) et fut importé aux USA en 1960 par des membres du Student Peace Union qui avait assisté à des manifestations contre des sites nucléaires britanniques.
Le symbole est une combinaison des 2 signaux de sémaphores représentant les lettres N et D, abréviations de Nuclear Disarmament. La lettre N est formée en tenant deux drapeaux sous la forme d'un V inversé et la lettre D, en tenant un drapeau vers le haut et un drapeau vers le bas.


Citation tirée du film qui résume bien l'idéologie anti-américaine qui aura tant de belles années, décennies, devant elle. Le personnage joué par Charles Denner : "Il faut toujours s'en prendre aux Américains même quand on pense avoir tort; eux savent qu'on a raison". 

Ah oui! Z signifie "il est vivant" en grec ancien. Lors de la prise du pouvoir par la junte militaire en 1967, on a décrété l'interdiction de la lettre Z dans les lieux publics.

Critique. Cahiers du Cinéma. Mars 1969. Numéro 210. Le Pyrée pour un homme par Jean Narboni.
Les 300 premiers numéros des Cahiers du Cinéma sur Archive.org

Oscars 1970. Montage et meilleur film en langue étrangère.
Cannes 1969. Prix du jury et prix du meilleur acteur à Jean-Louis Trintignant

Visionné, la première fois, en janvier 1970 au cinéma Empire à Québec
Dans l'ambiance de Z. Grosse année qui se prépare pour le Québec: premiers élus indépendantistes au gouvernement du Québec en avril mais, surtout, la Crise d'Octobre : le FLQ frappe fort et le gouvernement fédéral de Pierre Elliott Trudeau suspend certaines libertés civiles en votant la loi sur les mesures de guerre.
Pour moi, fin de ma carrière (2 ans!!, c'est pas sérieux!) d'enseignant au niveau Secondaire et retour aux études en licence de Géographie à l'université Laval de Québec.
Mon 65ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 18 janvier 2023

23 décembre 2007

64. Ford : The Man Who Shot Liberty Valance

1001 films de Schneider : The Man Who Shot Liberty Valance
L'Homme qui tua Liberty Valance


Film américain réalisé en 1962 par John Ford
Avec John Wayne, James Stewart, Vera Miles et Lee Marvin

Je sais. John Ford est un des plus grands réalisateurs américains. Je sais. The Man Who Shot Liberty Valance est souvent classé dans la liste des 100 meilleurs films. Mais rien n'y fait. Je trouve ce film vieilli et redondant tant par le sujet traité que par sa forme conventionnelle.

Sujet déjà traité par des films tels que High Noon de Fred Zinneman et Mr. Smith Goes to Washington de Frank Capra.

Forme conventionnelle : comment peut-on, en 1962, encore tourner en studio une scène d'attaque de diligence ?

Et John Wayne, vieilli, trop vieux pour ce rôle, perdu, dans ce film au verbiage pédagogique.

Un James Stewart, trop vieux pour son rôle de jeune avocat débutant, en train de répéter son rôle pour le film Mr. Smith Goes to Washington, pourtant tourné 23 ans auparavant.

Le contenu pédagogique du film, lourdement souligné, nous ramène pratiquement au cinéma des années 1930.

C'est la fin d'une époque. Les vieux spécialistes du western font leur dernier tour de piste. À l'horizon, Sergio Leone est en train de préparer ses westerns spaghettis : le western ne sera jamais plus le même.

Je n'avais pas encore vu les westerns de Leone qui allaient réhabiliter à mes yeux cette catégorie de cinéma. Mais, à cette époque effervescente sur le plan politique (post-mai 68, arrivée du Parti Québécois à l'assemblée nationale du Québec, crise d'Octobre 1970), pendant laquelle je ne m'intéressais qu'au cinéma à contenu politique, les vieux westerns traditionnels à la Ford-Wayne ne trouvaient aucune grâce à mes yeux. Ils étaient d'une époque révolue.

En 1962, nous sommes, aux USA, au milieu de la grande période de la défense des droits civiques des Noirs. Bob Dylan, Joan Baez, Pete Seger, entre autres, seront de célèbres porte-paroles de cette lutte lors de spectacles et, plus particulièrement, lors du Newport Folk Festival.

John Ford était conscient de ce mouvement en faveur des droits civiques. À un certain moment dans le film, Woody Strode , acteur Noir, (voir sa biographie remarquable quant à la lutte contre les barrières raciales) qui interprète le rôle de Pompey dans le film de Ford récite le 1er amendement de la constitution des USA dans lequel il est spécifié que tous les hommes sont égaux. On était loin du compte. À l'époque pendant laquelle se déroule l'action du film (1900-1910), on est loin de l'égalité entre Noirs et Blancs ou bien, comme on le constate plus loin dans le film lors de la période de votation, entre hommes et femmes. Comme dirait George Orwell, "tous les humains sont égaux mais il y en a certains qui sont plus égaux que d'autres".

Critique. Cahiers du Cinéma. Novembre 1962. Numéro 137. L'Amérique par excellence par Claude-Jean Philippe.
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Visionné, la première fois, en 1970 à la télévision à Québec
Mon 64ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 18 janvier 2023

12 décembre 2007

63. Whale : Frankenstein

1001 films de Schneider : Frankenstein


Film américain réalisé en 1931 par James Whale
Avec Colin Clive, Mae Clarke, John Boles et Boris Karloff

Trop de placotage, pas assez de monstre. Tout ce qui m'intéressait dans ce film, c'était Frankenstein. La mise en place de l'intrigue sans le monstre est longue, maladroite et pénible.

De plus, il me semble qu'il y a eu une erreur de casting : Colin Clive, 31 ans, aux allures d'agent immobilier, n'a aucune crédibilité en docteur Frankenstein. Quand on sait que Bela Lugosi (Dracula, 1931) avait été approché pour jouer ce rôle, on ne peut que regretter ce rendez-vous manqué entre Dracula et Frankenstein.

Bela Lugosi

Deux scènes valent à elles seules le visionnement de ce film plutôt mal fait :
1. La rencontre émouvante entre le monstre et la petite fille au bord du petit lac.
2. La scène finale où le monstre et son maître périssent dans l'incendie et l'écroulement du moulin. Deux ans plus tard, le gros singe King Kong va s'inspirer de cette scène et la transposer au cœur de New York en s'attaquant à son grand moulin, l'Empire State Building.

On s'imagine que la carrière de Boris Karloff a commencé avec sa personnification de Frankenstein tant sa carrière a été marquée par des rôles de monstre. En fait, il avait déjà joué dans 77 films lorsqu'il fut engagé, à 44 ans, pour personnifier Frankenstein dans le film de Whale.

Boris Karloff

Critique. Cahiers du Cinéma. Aout 1958. Numéro 86. Adieu Frankenstein par Ferydoun Hoveyda.
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Venise 1932. Prix du public

Visionné, la première fois, en 1970 à la télévision à Québec
Mon 63ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 18 janvier 2023

10 décembre 2007

62. Bergman : L' Heure du loup

1001 films de Schneider : L'Heure du loup


Film suédois réalisé en 1968 par Ingmar Bergman
Avec Max von Sidow (Johann), Liv Ullmann (Alma), Erland Josephson, Georg Rydeberg et Ingrid Thulin.

Bienvenue dans la période la plus noire du cinéma de Bergman.
Un film-cauchemar, un film d'horreur, un film gothique avec des monstres, des démons et des vampires.

Isolé avec sa femme sur une île de la mer du Nord, on assiste à la lente désintégration psychologique d'un artiste-peintre. Sa peur de la nuit et son angoisse face à l'aube qui pourrait ne jamais arriver détruit progressivement tous ses repères avec la réalité. 

Un monde parallèle s'échafaude; un monde hallucinatoire, cauchemardesque, habité par des aristocrates qui s'avèrent être, finalement, des démons et des monstres : Une schizophrénie en marche.

Axel Fridell, peintre suédois (1894-1935). Le Vieil antiquaire.
Ce tableau a inspiré Bergman pour plusieurs des scènes ésotériques du film.

"L'heure du loup, c'est l'heure où la nuit fait place au jour, c'est l'heure où la plupart des mourants s'éteignent, où notre sommeil est le le plus profond, où nos cauchemars sont les plus réels. C'est l'heure où celui qui n'a pu s'endormir affronte sa plus violente angoisse, où les fantômes et les démons sont au plus fort de leur puissance." Tiré du "pressbook" du film. (Cahiers du Cinéma d'août 1968, numéro 203)

"L'heure du loup" : J'ai toujours beaucoup aimé parler de cette expression lors de conversations qui touchaient aux rapports que nous avons avec la nuit. Elle crée un petit effroi dans le cercle des auditeurs parce qu'elle nous renvoie invariablement aux grandes angoisses qui sommeillent (si je puis utiliser cette expression) en nous.

L'angoisse qui monte chez l'insomniaque qui sent l'aube approchée sans avoir encore fermer l'œil est une épreuve difficile à soutenir. Elle mène souvent à l'épouvante. Cette épreuve que Bergman a souvent éprouvée au cours de sa vie, il réussit à la traduire parfaitement dans son film.

Mes scènes préférées : les moments qui précèdent l'aube où l'on voit Johan rongé par l'angoisse, au bord de la crise psychotique et Alma qui tente de ne pas sombrer à son tour dans l'abime. Une scène, en particulier, est troublante tant elle est anxiogène : l'éternité que représente le passage d'une minute.

L'acteur Georg Rydeberg, sosie de Bela Lugosi (le plus célèbre vampire de l'histoire du cinéma) incarne à la perfection un vampire.

Dans le numéro des Cahiers du Cinéma d'août 1968, il y a un très long entretien avec Ingmar Bergman autour de L'Heure du loup, intitulé La mort à chaque aube. Entre autres choses, il explique sa pratique "déconstructiviste" dont j'ai parlée dans un texte précédent (60. Anderson : If). Il fait remonter cette technique à Un Été avec Monika (1953), film-phare pour les futurs cinéastes de la Nouvelle Vague

Il s'agit de créer chez le spectateur une ambivalence : dès qu'il s'identifie à l'action ou aux personnages du film, on le replonge dans sa réalité de spectateur de cinéma en mettant sur l'écran des images ou des sons qui lui montrent qu'on est en train de fabriquer un film. Bergman: "J'ai découvert qu'un film ne souffre absolument pas de ce que l'on brise l'illusion, de ce que l'on contrarie la disposition des gens à se laisser illusionner pour les renvoyer face au cinématographe. C'est excellent de réveiller le public un bon coup, pour ensuite le plonger à nouveau dans le drame. Pour cette même raison, je répète le titre, "L'heure du loup", au milieu du film."

Pas le meilleur film pour s'initier à l'œuvre de Bergman. Allez voir plutôt du côté de Le Septième sceau, Les Fraises sauvages ou bien La Source. Mais, évidemment, ce qui est le plus passionnant c'est de s'attaquer à l'intégrale Bergman en suivant la progression chronologique de la production.

J'ai déjà trois intégrales Bergman à mon crédit. La première (une mini-intégrale de 20 films), à jamais tatouée sur mon cœur, a eu lieu au cinéma St-André-des-Arts sur la rue du même nom à Paris à l'automne 1988, lors d'une période sabbatique passée à Paris. La deuxième, plus prosaïquement, chez-moi à Montréal, en format DVD et VHS, à l'automne 2005. Puis une troisième, avec un copain, la vraie intégrale de 43 films, entre 2020 et 2022.

Critique. Cahiers du Cinéma. Juin-Juillet 1968. Numéro 202. Par Jacques Aumont
Les 300 premiers numéros des Cahiers du Cinéma sur Archive.org

Visionné, la première fois, le 17 octobre 1969 à la télévision à Québec
Dans l'actualité du Jour : "Saint-Laurent-des-Eaux (Loir-et-Cher, France). Fusion de 50 kg d'uranium lors d'une opération de chargement du réacteur graphite-gaz Saint-Laurent 1 (480 MW). La contamination serait restée limitée au site. Plus d'un an de réparations." En cette période où les grands vilains sont les gaz à effet de serre, ne pas oublier le piège peu médiatisé du nucléaire.
Mon 62ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 18 janvier 2023

05 décembre 2007

61. Welles : Falstaff

1001 films de Schneider : Falstaff



Film espagnol réalisé en 1965 par Orson Welles 
Avec Orson Welles, Keith Baxter, Jeanne Moreau, Margaret Rutherford, John Gielgud, Marina Vlady, Norkman Rodway, Walter Chiari, Michael Aldridge, Alan Webb et Beatrice Welles (10 ans) la fille d'Orson Welles.

J'ai écouté ce film en version originale anglaise avec sous-titres en anglais. Je lis parfaitement l'anglais mais je comprends l'anglais shakespearien. En fait je n'ai rien compris aux dialogues de ce film très théâtral si l'on excepte les scènes de bataille, parmi les plus sombres qu'il m'ait été donné de voir.

Déjà, les pièces de Shakespeare en français au cinéma m'amène dans mes dernières extrémités au niveau de la compréhension du texte, alors, imaginez mon désarroi devant cette mixture de Henry IV, Henry V, Richard III et les Joyeuses Commères de Windsor réunis dans ce Falstaff.

En 1939, Welles avait écrit Five Kings, une pièce de théâtre dans laquelle apparaissait cette histoire de John Falstaff, personnage créé par Shakespeare. C'est à partir de cette pièce qu'il a construit le scénario du film.

Histoire d'amour improbable entre un homme de 50 ans, bouffon, gourmand, menteur et le jeune prince de Galles qui à son investiture en tant qu'Henry V, le rejettera.


Critique. Cahiers du Cinéma. Aout 1966. Numéro 181. Welles au pouvoir par Serge Daney.
Les 300 premiers numéros des Cahiers du Cinéma sur Archive.org

Cannes 1966. Prix du 20ème anniversaire et Grand prix technique.

Visionné, la première fois, le 2 octobre 1969 au théâtre L'Estoc à Québec


Mon 61ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 19 janvier 2023

03 décembre 2007

60. Anderson : If...

1001 films de Schneider : If..



Film anglais réalisé en 1968 par Lyndsay Anderson
Avec Malcolm McDowell, David Wood, Richard Warwick, Christine Noonan et Robert Swann.

Tourné peu après Mai-68 et les grandes manifestations étudiantes en Occident, If est un des films les plus représentatifs de cette période de bouillonnement contestataire de la jeunesse occidentale. 

Cette contestation qui semblait être, à son départ, un grand chambardement de la société occidentale, ne devait s'avérer finalement qu'être un coup de gueule typique de la crise d'adolescence d'une société en mutation. Bon, d'accord, je simplifie un peu. Mais le parallèle entre le film traitant de la rébellion justifiée d'un petit groupe d'étudiants et cette période de contestation est trop évident pour ne pas céder à la tentation de faire ce raccourci.

À part quelques dérives surréalistes, si appréciées des adolescents, le film est d'un réalisme implacable. Le déroulement chronologique de l'histoire est d'une telle rigueur que la fin nous apparaît comme un ovni provenant d'un film tourné dans les années 1990 dans une quelconque école secondaire américaine (ça c'est un cliché, les USA n'ayant pas l'exclusivité de ces massacres; toujours se souvenir des femmes massacrées le 6 décembre 1989 à l'école Polytechnique de Montréal).

La rébellion attendue des étudiants est d'une telle ampleur que l'horreur qu'elle avait créée chez les spectateurs de l'époque fait plutôt sourire aujourd'hui tant les ficelles de la manipulation du réalisateur sont apparentes. Il voulait créer un émoi dans cette société britannique si conservatrice. Il y a réussi au-delà de toute espérance, le film ayant obtenu le "X certificate", fusée qui fit de ce film un des plus grands succès commerciaux de l'histoire du cinéma britannique. Et, évidemment, on ne pouvait y échapper, il est devenu, de ce fait, un film-culte.

Film-culte : valise fourre-tout dans laquelle se retrouvent des films qui ont en commun leur immunité face à la critique. On y trouve du meilleur et du pire (les films d'Edward Wood). On en est à 759, rien que çà, sur le site AlloCiné.

On retrouve, comme dans Les Petites marguerites de Vera Chytilova l'alternance entre la couleur et le noir et blanc, apparemment parce qu'il n'y avait plus d'argent (des "on-dit" de critiques) pour acheter de la pellicule couleur avant la fin du tournage mais probablement plus pour se conformer à une certaine tendance populaire à cette époque du cinéma d'art et d'essai qu'on pourrait appeler le déconstructivisme, pleinement illustré dans Persona de Bergman. Il s'agissait de rappeler constamment aux spectateurs le caractère artificiel du cinéma, son aspect "produit industriel" en semant tout au long du film des éléments qui nous rappellent que nous sommes des spectateurs et que nous n'appartenons pas à la réalité du film.

Malgré tout ce que j'ai dit précédemment, j'ai adoré ce film. Ce film traverse le temps d'une manière remarquable si l'on fait exception de certaines séquences, peu nombreuses il faut l'avouer, qui nous rappellent cette période du "pouvoir des fleurs" où l'onirisme, l'ésotérisme et le surréalisme imprégnaient une grande partie de la production artistique.

Le souvenir que j'en gardais était assez horrible. Le contexte dans lequel je l'ai vu, la première fois, est responsable de cette perception.

Je commençais ma deuxième et dernière année d'enseignement à titre de professeur de Géographie dans une école secondaire (école pour les 12-16 ans) de la région de Québec et j'étais très malheureux. On m'avait confié des classes de Secondaire III (14 ans). Deux semaines, à peine, après le début des classes, j'étais immergé par les problèmes de gestion de classe : indiscipline, violences verbales, confrontations avec certains élèves délinquants.  La routine typique de l'enseignement dans une école secondaire, quoi. Les trois délinquants du film d'Anderson me replongeaient dans les affres de ma vie quotidienne. En conséquence, j'ai longtemps gardé une certaine appréhension illogique vis-à-vis les films où l'on retrouvait Malcolm McDowell; et deux ans plus tard, A Clockwork Orange n'allait certainement pas arranger les choses.

Cannes 1969 : Palme d'or

Visionné, la première fois, le 11 septembre 1969 au cinéma Empire à Québec
Dans l'actualité du jour :
"La projection du film Z du réalisateur français Costa-Gavras a été marquée hier soir par des incidents dans plusieurs salles parisiennes. Des engins fumigènes ont été lancés entraînant l'interruption de la projection dans 4 cinémas." (Journal L'Action, de Québec).
Des groupes de droite ont revendiqué cette action en contrepartie des actions de groupes de gauche qui perturbaient, depuis le début de l'année, la projection du film de John Wayne, Les Bérets verts, justifiant l'intervention des USA au Vietnam.
Mon 60ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 17 janvier 2023

30 novembre 2007

59. Chytilova : Les Petites marguerites

1001 films de Schneider : Les Petites marguerites



Film tchécoslovaque réalisé en 1966 par Vera Chytilova 
Avec Ivana Karbanova et Jitka Cerhova

Les facéties de deux jeunes idiotes (dixit Chytilova), Marie 1 et Marie 2, qui tentent de comprendre le sens du monde tout en essayant de le subvertir.

Surréaliste, dadaïste, psychédélique, festif, ce film de la Czeck New Wave est une immense tarte à la crème lancée à la gueule des autorités politiques des pays communistes est-européens. Et pour être certaine que ceux-ci ont bien compris le message, Chytilova leur dédicace le film : "This film is dedicated to those whose sole source of indignation is a messed-up trifle".

Dans la société totalitaire de l'époque en Tchécoslovaquie, un tel film "décadent" et "élitiste" n'avait pas droit de vie, surtout après l'invasion des troupes du Pacte de Varsovie en août 1968. Sa réalisatrice, qui décida de rester malgré tout en Tchécoslovaquie, contrairement à son collègue Milos Forman, fut interdite de travail pendant 8 ans.

Souvent les critiques tombent dans l'hystérie de l'interprétation. Ils cherchent à tout prix à décrypter la volonté du réalisateur. Dans ce film, on a un bon exemple de l'échec de cette obsession. Exemple : Chytilova a utilisé de la pellicule noir et blanc et de la pellicule couleur. Des critiques se sont échinés à nous expliquer la signification de cette pratique, alors qu'il suffisait de demander. Vera Chytilova à Serge Daney des Cahiers du Cinéma en août 1966 : "S'il y a quelques scènes en noir et blanc, au début du film, c'est que nous n'avons pas eu assez de pellicule couleur..." Et voilà l'échafaudage critique à plat sur le plancher.

Cahiers du Cinéma : Dans la liste des 10 meilleurs films de l'année 1966

Visionné, la première fois, le 26 août 1969 à la télévision à Québec
Mon 59ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 17 janvier 2023

24 novembre 2007

58. Camus : Orfeu Negro

1001 films de Schneider : Orfeu negro


Film brésilien réalisé en 1959 par Marcel Camus
Avec Marpessa Dawn et Breno Mello.

Voulez-vous lire un critique qui assassine un film?
Lisez Godard dans les Cahiers du Cinéma de juillet 1959. Numéro 97):
"La gentillesse et la sincérité de Marcel Camus ne sont pas en cause. Mais voilà, suffit-il d'être gentil et sincère pour faire un bon film? On ne dirige pas ses comédiens Noirs avec les mêmes mots et les mêmes gestes que Jean Boyer dirigeant Line Renaud et Darry Cowl dans une guinguette reconstituée sur les plateaux de Billancourt." Et pan dans la tronche!

Évidemment, ce film ne mérite ni une telle hargne, ni une telle méchanceté. Mais ce qui suit explique probablement une critique si injuste.

Ce film a remporté la Palme d'or du Festival de Cannes de 1959 au détriment du film de Truffaut, Les Quatre cents coups, un des films-phares de la Nouvelle Vague naissante. Le fait que Truffaut reçut deux autres prix à ce même Festival a éteint la grogne qui régnait parmi plusieurs critiques. Le film de Camus, bon enfant, empreint d'exotisme et d'un certain paternalisme, n'est tout simplement pas à la hauteur des films de la jeune garde française. Malgré une excellente facture, il apparaît comme un ovni par rapport à la nouvelle tendance du cinéma français

Luiz Bonfa et Antonion Carlos Jobim, deux des meilleurs compositeurs de sambas afro-brésiliennes (Jobim a composé La fille d'Ipanima) sont les vedettes à part entière de ce film que les critiques brésiliens n'ont pas vraiment apprécié. Ils trouvaient que le film était un ramassis de clichés liés à la vie brésilienne : exotisme de Rio, carnaval endiablé, latinos au sang chaud, les images cartes postales de la baie et du Pain-de-Sucre.

En effet, comment Camus a-t-il pu cacher les favelas et toute la misère des Cariocas (habitants de Rio) ? Et son idéologie style "le-bonheur-simple-des-pauvres-gens" n'a plus beaucoup de crédibilité aujourd'hui après toutes ces décennies d'études sur les conditions du sous-développement.

Antonio Carlos Jobim (compositeur de la musique du film), Vinicius de Moraes (rédacteur du scénario), des noms qui seront popularisés, en France, par Pîerre Barouh, par sa chanson Samba Saravah dans le film, Un Homme et une femme, de Claude Lelouch.

Encore une fois, un travail extraordinaire de remastérisation du film d'origine par Criterion, notre bouée de sauvetage en Amérique pour ce qui est de la production internationale.

Appartenant à la région 1, nous n'avons pas accès en Amérique à toute la production européenne sur DVD (région 2), à cause d'incompatibilité technologique.

Chanson-thème du film : Manha do Carnaval. Un incontournable de la chanson internationale.

Critique. Cahiers du Cinéma. Juillet 1959. Numéro 97. Le Brésil vu de Billancourt par Jean-Luc Godard.
Les 300 premiers numéros des Cahiers du Cinéma sur Archive.org

Oscars 1960. Meilleur film en langue étrangère
Cannes 1959. Palme d'or

Visionné, la première fois, le 9 août 1969 à Québec.
En salle, cette journée-là, à Québec

Il semble que Coplan ait survécu au Miracle de l'amour. Mais le suspense demeure : survivra-til à la 2ème attaque?
Miracle de l'amour : version doublée de Das Wunder der Liebe de Franz Josef Gottlieb. Un documentaire sur l'art du bonheur conjugal !!! Coté 6. Pauvre. Par Mediafilm.ca
Coplan sauve sa peau : un film d'Yves Boisset. Surprenant, n'est-ce pas? À sa décharge, c'était son premier long métrage. Avec la présence d'un de mes acteurs fétiches : Klaus Kinski.
Mon 58ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 17 janvier 2023

15 novembre 2007

57. Kubrick : 2001 : A Space Odyssey

1001 films de Schneider : 2001 : A Space Odyssey


Film anglais réalisé en 1968 par Stanley Kubrick
Avec Keir Dullea, Gary Lockwood, William Sylvester et Douglas Rain, la voix de l'ordinateur HAL (Heuristic Algorithmic Computer).
Si vous ajoutez une lettre à chacune des lettres, vous obtenez IBM. Un hasard, paraît-il.

Quarante ans et pas une ride. Je sais, je me répète (voir Rosemary's Baby).
Encore plus que le film de Polanski, ce film est complètement à l'abri du temps.
Une des façons, que j'estime infaillible, de vérifier la modernité de certains films anciens, c'est de les visionner avec ma fille de 16 ans. Il doit réussir à franchir les trois étapes suivantes :
Première étape : elle voit le film au complet.
Deuxième étape : elle est totalement accaparée par le film.
Troisième étape : elle est agacée par mes fréquents commentaires sur le film.
Si ces trois étapes sont franchies, je suis certain que le film a vaincu l'outrage des ans.

Le plus grand film de science-fiction EVER.
Cet extrait d'une critique de Bernard Eisenschitz des Cahiers du cinéma (no. 209, février 1969) explique la phrase précédente : "...l'effet du film est certainement d'endormir le sens critique, de nous plonger dans une euphorie. Le tournoiement des satellites à la musique de J. Strauss provoque un sentiment de confort, de bien-être, culminant dans la précision de l'introduction d'une astronef de forme oblongue dans l'orifice central d'un satellite!!!"

Voir ce film à peine deux semaines après le premier pas sur la Lune de Neil Armstrong nous a complètement dévastés. Le saut de paradigme était trop grand. Nous étions sans voix pour parler de ce film. On voulait tout comprendre alors que tout nous échappait. Arthur C. Clarke a dit à ce propos : "If you understand 2001 completely, we failed. We wanted to raise far more questions than we answered."
Stupeur et tremblements

À la fin du film, alors que nous sommes complètement sous le choc, apparaît cette image que nous voyons par l'entremise des yeux du vieil Homme mourant à son ancien Monde pour laisser la place au nouvel Homme des étoiles.

Revu récemment, la stupeur et les tremblements ont disparu. Le scénario est plus facile à comprendre et le monolithe ne fait plus aussi peur. On se fabrique une métaphore à laquelle l'on croit fermement.

Le monolithe, c'est au choix : Dieu, une découverte technologique majeure qui fait faire un bond à l'humanité, une balise qui montre la direction de l'évolution humaine ou un gros parallélépipède noir mis dans le film par Kubrick pour embêter tout le monde pendant des lunes...

Toutes les réponses à vos interrogations soulevées par le film se retrouvent dans le roman, 2001, l'odyssée de l'espace, rédigé parallèlement à la réalisation du film par Arthur C. Clarke.

À lire dans la collection omnibus : Arthur C. Clarke, 2001-3001. Les odyssées de l'espace. On y retrouve la nouvelle à l'origine de la présence du monolithe, La sentinelle, publiée en 1951.

Critique. Cahiers du Cinéma. Février 1969. Numéro 209. La Marge par Bernard Eisenschitz.
Les 300 premiers numéros des Cahiers du Cinéma sur Archive.org

Oscars 1969. Effets visuels.

Visionné, la première fois, le 7 août 1969 au cinéma de Ste-Foy à Québec
Dans l'actualité du jour : "Le premier équipage américain à se poser sur Mars - dans les années 80 - passera d'un mois à six semaines sur la surface de cette planète" a révélé le Dr. Thomas O. Paine, directeur de la NASA. Paine est décédé depuis 1992 et pas encore l'ombre d'un astronaute dans le voisinage de Mars. (Journal l'Action, Québec)
Mon 57ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 17 janvier 2023

06 novembre 2007

56. Polanski : Rosemary's Baby

1001 films de Schneider : Rosemary's Baby


Film américain réalisé en 1968 par Roman Polanski
Avec Mia Farrow, John Cassavetes, Ruth Gordon et Sidney Blackmer. La voix de Tony Curtis.

Quarante ans et pas une ride.
Le chef-d'œuvre de Polanski traverse le temps sans coup férir. Le lent montage du complot ou de la paranoïa de Rosemary est toujours aussi efficace. Cette lenteur du scénario qui est souvent le plus grand tort que l'on trouve aux films anciens est, ici, un élément fondateur du film. Sans cette lenteur, pas de complot, ni de paranoïa; ce ne serait qu'un banal thriller.

Dans une entrevue pour les Cahiers du Cinéma de janvier 1969, Polanski nous dit que tout le film est réalisé pour créer l’ambiguïté. "...je ne veux pas que le spectateur pense ceci ou cela : je veux simplement qu'il ne soit sûr de rien. C'est cela le plus intéressant, l'incertitude."

Mais, lorsque, à la fin du film, Rosemary s'approche du berceau, tout de noir décoré, pour enfin prendre contact avec son bébé qu'elle n'a pas encore vu, toute ambiguïté tombe. À tel point, qu'il paraît qu'une grande partie des spectateurs sont certains d'avoir vu le bébé alors qu'il n'apparaît dans aucun plan. J'ai vécu, moi-même, ce trouble de la perception. J'aurais juré, avant de revoir ce film il y a quelques jours, que j'avais vu le bébé avec ses pieds fourchus lors de mon premier visionnement en 1969.

L'art de se mettre les pieds dans les plats.
Était-ce vraiment une bonne idée d'amener ma future conjointe, Annie, voir ce film moins d'un mois avant notre mariage? Non, pas vraiment. Elle est sortie du cinéma en larmes, complètement perturbée. Des jours à se remettre sur pied. Le cœur n'était plus à la préparation des noces. Et cette phrase tirée de la publicité du film, "On ne connaît jamais vraiment ceux qui nous entourent", n'allait pas arranger les choses.

Il y a de ces hasards qui vous jetteraient dans les bras du premier couple de Témoins de Jéhovah à se présenter à votre porte. Nous avons reçu en cadeau de noces l'ensemble de vaisselle Sherwood de Denby/Langlay. Évidemment, ça ne vous dit rien. Mais moi, si. Pendant des années, j'ai mangé dans le même modèle d'assiette que l'on retrouve à la table de Rosemary en voyant le gros plan du couteau de Rosemary tranchant un morceau de foie de veau sanguinolent sur cette assiette. Dur !!!

Le Dakota : Le film a été tourné dans un studio de Hollywood mais les vues extérieures proviennent de ce célèbre immeuble situé en face de Central Park à New York.

John Lennon fut assassiné devant cet immeuble où il résidait avec Yoko Ono le 8 décembre 1980. J'ai appris cette nouvelle à la sortie d'un concert donné par Diane Dufresne à l'ancien Forum de Montréal.
Immeuble qui a hébergé un tas de célébrités : Lauren Bacall, José Ferrer, Judy Garland, Boris Karloff, Rex Reed, Leonard Bernstein, Charles Henri Ford et Rudolf Nureyev.

NON !!! PAS UN ROSEMARY'S BABY II Look What's Happened to Rosemary's Baby  réalisé pour la télévision en 1976 par Sam O'Steen est, paraît-il, "total garbage" : un four... une fournaise où périront tous les profanateurs du chef-d'œuvre de Polanski.

Critique. Cahiers du Cinéma. Décembre 1968. Numéro 207. Everybody Loves My Baby par Pascal Kané.
Les 300 premiers numéros des Cahiers du Cinéma sur Archive.org

Oscars 1969. Meilleure actrice dans un rôle de soutien à Ruth Gordon.

Visionné, la première fois, le 3 août 1969 au cinéma Capitole à Québec
Six jours plus tard, Sharon Tate, la conjointe de Roman Polanski, était assassinée.
Mon 56ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 17 janvier 2023

17 octobre 2007

55. Hitchcock : The Wrong Man

1001 films de Schneider : The Wrong Man
Le Faux coupable


Film américain réalisé en 1956 par Alfred Hitchcock
Avec Henry Fonda (Manny Balestrero), Vera Miles, Anthony Quayle et Harold J. Stone

En deux mots. L'histoire d'un contrebassiste new-yorkais, Manny Balestrero, injustement accusé de vols suite à une accumulation de fausses identifications par des témoins peu compatissants. On assiste à sa descente aux enfers ainsi qu'à celle de sa femme qui se retrouvera en hôpital psychiatrique.

Finalement, par pur hasard, pendant un procès perdu d'avance, le vrai coupable est arrêté.

"In 1953, New York City musician Christopher Emmanuel "Manny" Balestrero was acquitted of a robbery charge that had been based on three mistaken IDs. The real robber, once police found him, strongly resembled Balestrero."

Balestrero à la compagnie d'assurance : innocent mais déjà derrière les barreaux.

C'est à peu près à l'époque du visionnement de ce film, printemps 1969, que j'ai commencé à acheter les Cahiers du Cinéma et à me procurer les anciens numéros.
Mon premier numéro :

Juin 1969. Numéro 213. 6 francs (nouveau, si ça dit encore quelque chose à quelqu'un).
Sur la couverture : Anne Wiazemsky (petite-fille de François Mauriac et ex-épouse de Jean-Luc Godard) et Carmelo Bene. 
J'ai acheté tous les numéros jusqu'au 400ème et je me suis procuré les 14 volumes des fac-similés de ce que l'on appelle les Cahiers jaunes (les 161 premiers numéros qui couvrent la période d'avril 1951 à décembre 1964).

Critique. Cahiers du Cinéma. Juin 1957. Numéro 72. Le Cinéma et son double par Jean-Luc Godard.
Les 300 premiers numéros des Cahiers du Cinéma sur Archive.org

Cahiers du Cinéma : Dans la liste des 10 meilleurs films de l'année 1956

Visionné, la première fois, le 6 juin 1969 à la télévision à Québec
Mon 55ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 4 février 2023

10 octobre 2007

54. Capra : Mr. Deeds Goes to Town

1001 films de Schneider  : Mr. Deeds Goes to Town
L'Extravagant Mr. Deeds


Film américain réalisé en 1936 par Frank Capra
Avec Gary Cooper (Longellow Deeds), Jean Arthur, George Bancroft et Lionel Stander

Transposition pour adultes de la bande dessinée de Disney, Le rat des champs et le rat des villes.

Le grand poète de la campagne (Longfellow Deeds), du Vermont, je crois, au cœur sensible et tellement authentique qui débarque dans le monstre froid, impersonnel et malfaisant de la grande ville, New York. Après 10 minutes de celluloïd, tout était joué. Le cœur allait gagner sur la raison. Et vive les topinambours!!

Certaines scènes valent à elles seules le film :
Gary Cooper qui accompagne au tuba Jean Arthur qui tambourine Swanee River sur un banc de Central Park.
La lecture du poème de Deeds dans lequel il fait sa demande en mariage à Arthur. Sniff!

L'inévitable procès qui dure une éternité brise toute la dynamique du film. Les scènes de tribunal, longues et laborieuses, quoique à certains moments assez drôles, nous mèneront à la conclusion que nous connaissions depuis le tout début du procès : la victoire du rat des champs.

Gary Cooper, dans les scènes du procès, est complètement à côté de ses pompes. On voit très bien que les plans de Cooper ont été tournés ailleurs tant ses mimiques sont inappropriées ou grotesques.

Il m'arrive quelquefois d'être totalement injuste avec un film en ignorant son contexte historique. C'est le cas ici. Je suis incapable de me dégager de la fournée de stéréotypes servie par cette histoire.

Cette attitude est peut-être induite par ma présente lecture du livre de Al Gore, Une vérité qui dérange ou serait-ce plutôt une vérité qui dérape. Ce document est tellement farci de clichés et de bons sentiments "écolo-ma-pauvre-planète-qui-meurt" et d'erreurs grossières que j'enrage. Al Gore, le Longfellow Deeds de l'environnement, discrédite une lutte écologique incontournable par sa niaiserie éditoriale. Et le film qui a gagné des tas de prix dont le Oscar 2006 pour le meilleur documentaire : Good Grief comme dirait Charlie Brown.

Oscars 1937. Réalisation
Venise 1936. Prix spécial

Visionné, la première fois, en mai 1969 à la télévision à Québec
Mon 54ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 17 janvier 2023

08 octobre 2007

53. Tati : Mon oncle

1001 films de Schneider : Mon oncle


Film français réalisé en 1958 par Jacques Tati
Avec Jacques Tati, Jean-Pierre Zola et Adrienne Servantie

1958. Paris est en pleine révolution urbaine. En même temps qu'on construit des milliers de logements sociaux autour de la capitale dans les espaces qu'on appelle la "zone", on démolit certains quartiers populaires inadéquats à l'habitat tel le 13ème arrondissement autour de la Place d'Italie. Rénovation et démolition des quartiers anciens expulsent vers la banlieue des dizaines de milliers de prolétaires pour faire place à l'arrivée de classes sociales plus nanties.

À peu près au moment où j'ai vu Mon oncle pour la première fois je commençais à me passionner pour la question urbaine, je souhaitais faire une maîtrise en urbanisme dès la fin de mon baccalauréat en Géographie à l'Université Laval. La lecture d'un livre de Paul-Henri Chombart de Lauwe, Des hommes et des villes, paru en 1965, m'avait profondément marqué. Dans ce bouquin il décrit le délabrement de l'habitat dans le 13ème arrondissement de Paris dans les années 50. Mais, ce qui m'avait particulièrement touché, c'était la description de cet univers villageois au cœur d'une des plus grandes métropoles du monde.

En revoyant Mon oncle, j'ai l'impression de replonger dans l'univers décrit par Chombart de Lauwe (1913-1998), l'un des plus grands anthropologues urbains du 20ème siècle et le précurseur de la sociologie urbaine en France.

Par ailleurs, je ne me suis jamais inscrit en urbanisme. En lieu et place, je partis travailler pour Jeunesse Canada Monde (organisme canadien qui a créé un programme d'échanges entre des jeunes Canadiens et des jeunes provenant de pays du tiers monde) à titre de coordonnateur de l'échange avec le Mexique. C'était en septembre 1972.

On ne peut revoir ce film qu'avec un regard attendri. Cette opposition entre la modernité source de conformisme et de rigidité émotionnelle et la tradition, source d'humanité et de convivialité fait sourire. Ce combat, sans cesse recommencé et sans cesse perdu par la tradition, est sur-caricaturé dans le film de Tati. Entre le début où les crédits du film sont présentés comme les panneaux que l'on retrouve près des édifices en construction (idée géniale reprise par Coppola dans Apocalyse Now) et la fin où l'on voit les démolisseurs s'attaquer aux bâtiments anciens, Tati trace à gros traits l'opposition entre la banlieue et le quartier ancien.

Mais, 50 ans plus tard, sa conclusion pessimiste ne s'est pas réalisée. Il faut dire que le développement urbain a toujours été une fantastique fabrique de pronostics apocalyptiques à propos de l'écrasement de l'homme sous la dictature de la modernité.

Les quartiers anciens sont de plus en plus recherchés. La plus-value immobilière de ces quartiers confirme ce nouvel engouement. Il va sans dire que la discrimination socioéconomique exercée par cette plus-value a complètement changer le contenu sociologique de ces quartiers. On appelle ce phénomène, la gentrification. Le plus bel exemple montréalais de cette action : le quartier du Plateau Mont-Royal. Pratiquement, tout le Paris intra-muros, à l'exception des "beaux quartiers" est un exemple de gentrification.

Monsieur Hulot c'est le grand-père de Monsieur Bean. En effet, Hulot est un vrai anglais : grand, dégingandé, imperméable, pipe, parapluie et chapeau. Son extrême politesse et sa froideur émotionnelle le ferait sortir directement d'un Chapeau melon et bottes de cuir loufoque. Je ne sais pas si Roman Atkinson a jamais reconnu cette dette mais elle est indubitable. C'est presque du plagiat.

L'abus du thème musical me tombe royalement sur les nerfs. Plus capable. Ce Franck Barcellini n'a fait la musique que de trois autres films dont le célèbre et émouvant Couche-moi dans le sable et fais jaillir ton pétrole !!!!!!!

Ironie de la chose : Ce beau petit quartier urbain si idéalisé dans le film n'est, en fait, qu'un décor. Le film a été tourné dans les studios de la Victorine à Nice. Studio célébré dans le film La nuit américaine de François Truffaut.

Un des grands plaisirs que j'ai à refaire le chemin des films de ma vie c'est, pour chacun des films regardé à nouveau, de retourner fouiller dans ma collection des Cahiers du cinéma afin d'y retrouver les critiques de l'époque. Pour Mon oncle, je plonge dans ma collection des Cahiers jaunes réédités : les numéros 65, 82 (photo) et 84.










Critique. Cahiers du Cinéma. Juin 1958. Numéro 84.  La Pesanteur et la grâce par Claude Beylie.
Les 300 premiers numéros des Cahiers du Cinéma sur Archive.org

Oscars 1959. Meilleur film en langue étrangère
Cannes 1958. Prix spécial du jury
Cahiers du Cinéma : Dans la liste des 10 meilleurs films de l'année 1958.

Visionné, la première fois, en mars 1969 au cinéma à Québec
Mon 53ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 16 janvier 2023

05 octobre 2007

52. Ophuls : Lola Montès

1001 films de Schneider : Lola Montès


Film franco-allemand réalisé en 1955 par Max Ophuls
Avec Martine Carol, Peter Ustinov, Anton Walbrook, Oskar Werner et Paulette Dubost.

"Max Ophuls reste imperméable aux modes et aux tendances. La guerre, la bombe atomique, la misère le concernent comme homme mais non comme artiste. Il est le cinéaste du dix-neuvième siècle. Sans doute est-il le seul cinéaste à se sentir plus à l'aise en dirigeant un film à costumes." François Truffaut, Les Cahiers du cinéma, numéro 55, janvier 1956.

Par ailleurs, Truffaut, plutôt indifférent à l'histoire racontée, est complètement estomaqué par la maîtrise et l'innovation du traitement cinématographique. Sur ce plan, il compare ce film à Citizen Kane, rien de moins.

Voilà, Frank Truf résume bien mon point de vue. Cette histoire de viennoiseries galantes me laisse totalement indifférent. Faux, ça m'ennuie au plus haut point.

Qui peut croire qu'un roi (Louis de Bavière) ait risqué son royaume pour Martine Carol que le réalisateur évite de nous montrer en gros plan. À peine un plan rapproché vers la fin du film. Comme si, lui aussi, ne pouvait l'imaginer en femme fatale, destructrice d'empire.

Pauvre Martine Carol qui allait tomber en disgrâce auprès du public français qui n'aurait d'yeux (quel euphémisme!) dorénavant que pour la nouvelle sex-symbol, Brigitte Bardot.

Paradoxe intéressant : les critiques des Cahiers du Cinéma sont tombés en pamoison devant ce film qui pourtant allait marquer la fin d'un certain cinéma français entiché de scénarios bâtis sur des personnages ou des événements historiques. Dans quelques années, ces mêmes critiques allaient tourner le dos à ce type de cinéma et fonder la Nouvelle Vague : révolution des contenus et de la forme.

Marie-Dolorès Gilbert, dite " Lola Montès " (Iristown, Irlande, 23 juin 1818 - New York, États-Unis, 17 janvier 1861)


Paulette Dubost, née en 1910.
1931 : Premier film. Le Bal de Wilhelm Thiele
2007 : Son 215ème et dernier film. Curriculum de Alexandre Moix.
Une carrière de 76 ans. (Décédée en 2011)











Oskar Werner (1922-1984) : à jamais le Jules de Jules et Jim de François Truffaut. Mais aussi un pompier incendiaire dans Fahrenheit 451 du même Truffaut. Par ailleurs, mystérieusement, petite carrière d'à peine 31 films qui s'arrête 8 ans avant son décès en 1984.











Critique. Cahiers du Cinéma. Janvier 1956. Numéro 55. Lola au bucher par François Truffaut. Février 1956. Numéro 56. Lola aux pieds nus par Jacques Siclier.
Les 300 premiers numéros des Cahiers du Cinéma sur Archive.org 

Cahiers du Cinéma : Dans la liste des 10 meilleurs films de l'année 1955.

Visionné, la première fois, en mars 1969 à la télévision à Québec
Mon 52ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 4 février 2023