26 février 2008

75. Rohmer : Ma nuit chez Maud

1001 films de Schneider : Ma nuit chez Maud


Film français réalisé en 1969 par Éric Rohmer
Avec Jean-Louis Trintignant, Françoise Fabian, Marie-Christine Barrault, Antoine Vitez

Enfin un Rohmer. Il n'y en aura que deux sur la liste de Schneider. Triste.

Je sais que Rohmer peut en horripiler plus d'un, voire des centaines de milliers, mais, moi, je suis un "fan fini" de Rohmer, un inconditionnel. Tous ses films, j'aime. Alors, n'avoir à commenter que deux films sur ce site contre huit pour Godard que j'adore détester, je hurle à l'injustice.

Pourquoi j'aime Rohmer? Dialogues, dialogues, dialogues.

Ce sont de purs produits d'orfèvrerie. Quand ils sortent de la main du maître, ils sont inaltérables. L'acteur ne peut en changer une virgule. Dans une entrevue que Jean-Louis Trintignant donnait en 1974 au sujet de Ma Nuit chez Maud, il confirmait cette dictature du texte qui s'étendait jusqu'aux onomatopées; quand c'était écrit heu! heu! heu! dans le texte, eh bien l'acteur était tenu de les reproduire intégralement.

Tour de force de Rohmer. En pleine révolution sexuelle des années 60 et 6 mois après Mai-68, présenter un film dans lequel l'on voit un homme (Trintignant) dormir à côté d'une femme, nue sous les draps (Fabian) et refuser de lui faire l'amour au nom de principes moraux inspirés de sa foi chrétienne. Il n'y a pas film plus anachronique en 1969 que ce Ma Nuit chez Maud. Trintignant a vraiment l'air d'un martien avec son catholicisme, ses discussions sur les Pensées de Pascal et ses phrases du genre " Ce qu'il faut c'est la pureté du cœur ".

Mais, comme l'on voit souvent, un film qui est peu tributaire des modes et de l'idéologie dominante de son époque, vieillit bien et demeure toujours actuel. C'est un plaisir immense de revoir ce film et d'écouter à nouveau ces joutes oratoires entre les différents personnages. A contrario, la majorité des films de Godard des années 1960, marqués par l'idéologie gauchiste de son époque, ont très mal vieillis.

Ce film fait partie du cycle Les Contes moraux tournés entre 1962 et 1972.
1. La Boulangère de Monceau
2. La Carrière de Suzanne
3. Ma Nuit chez Maud
4. La Collectionneuse
5. Le Genou de Claire
6. L'Amour, l'après-midi
Thème commun à tous les films de ce cycle : le choix de la femme, la tentation de l'infidélité puis le retour vers l'élue.

Critique. Cahiers du Cinéma. Juillet-Aout 1969. Numéro 214. Maud et les phagocytes par Pascal Bonitzer.
Les 300 premiers numéros des Cahiers du Cinéma sur Archive.org

Lecture cinéphilique.
Itinéraire d'un ciné-fils de Serge Daney. Propos recueillis par Régis Debray. 1999. Abondante iconographie tirée de dizaines de films.
Daney : ex-rédacteur-en-chef au Cahiers du Cinéma et chroniqueur de cinéma à Libération dans les années 1980.
"J'ai été très libéré le jour où je me suis rendu compte que ce que j'avais attendu du cinéma, ce que j'avais aimé dans le cinéma et ce que le cinéma m'avait donné, c'était l'invention du temps, à commencer par le mien." S. Daney.
Un film extraordinaire, sous-évalué, qu'il faut voir, selon Daney: Le Ciel est à vous de Jean Grémillon. Pour moi, inconnu au bataillon.

Visionné, la première fois, le 22 juin 1971 à la télévision à Québec
Mon 75ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 19 janvier 2023