11 mai 2009

132. Renoir : Boudu, sauvé des eaux

1001 films de Schneider : Boudu, sauvé des eaux


Film français réalisé en 1931 par Jean Renoir
Avec Michel Simon (Priape Boudu), Charles Granval (Édouard Lestingois), Marcelle Hainia (Emma Lestingois), Sévérine Lerczinska (Chloé Anne-Marie)

D'abord, parlons de Paris.
Boudu, sauvé des eaux, c'est le Paris de René Clair, revu et corrigé par Jean Renoir.

Lors du message sur le film Le million, je parlais de ma tristesse de ne pas voir, dans ce film de René Clair, le Paris des années 30, ayant plutôt à me farcir, à la place des vraies rues de Paris, des maquettes et du carton-pâte
.
Le hasard a voulu, en 1976, que je vois le film de Renoir seulement 4 jours après celui de Clair. Alors, voilà, Renoir me donne le Paris dont je rêvais en voyant le film de René Clair.

Lorsque je ne ne suis pas scotché à mon écran de télé ou de portable, je donne des conférences et des cours : Venise, ville médiévale en péril; Les changements climatiques; Tremblements de terre, tsunami et volcans; La Traversée des Alpes françaises à pied et L'histoire de la ville : de Babylone à New York. Je termine toujours ce dernier cours en présentant un diaporama de photos sur Paris, ce qui permet de faire une synthèse de l'histoire de l'urbanisme en Occident.

Alors, Paris, pour moi, c'est la Ville; Hemingway ne disait-il pas Paris est une fête. (J'ai toujours pensé jusqu'à aujourd'hui que le titre était Paris est mille fêtes - pour vous dire mon préjugé pro-Paris). Livre incontournable pour les amoureux de Paris. Expérience urbaine à jamais inoubliable - mes six mois à Paris en 1988.

Tout ça pour dire que j'ai été fasciné par ce Paris de 1931 que Renoir nous présente. Mais, surtout, impressionné par cette séquence où l'on voit Michel Simon, en clochard, déambuler sur les quais de la Seine, passant devant les bouquinistes, complètement noyé dans la foule anonyme. Un faux documentaire plus vrai que vrai.

Boudu, mais c'est Néandertal dans votre salon.
C'est le surmoi en vacances.
Quand le surmoi n'y est pas, le Ça danse.
(Droits d'auteur enregistrés pour ces 3 phrases.)

Deux séquences avaient causé des émeutes lors de la sortie du film au point d'en suspendre la projection 
Boudu, mangeant avec ses doigts des sardines dégoulinantes et Boudu, essuyant le cirage encore frais de ses chaussures avec les draps en satin de la bourgeoise.

En fait, tout le film est une immense tarte à la crème lancée à la figure de la bonne société.

La finale du film, c'est Boudu, sauvé des autres.
Dans le deuxième scénario de noyade, Boudu n'est pas sauvé des eaux mais, plutôt, il se sauve des autres, de l'encadrement trop serré de la société et, tel un poème de Prévert, il bondit hors de l'École (qui dit École avec une majuscule, dit dogmatisme, n'est-ce pas ?) et, déguisé en épouvantail (ce qu'il est, de fait, pour la société), s'en va parcourir les chemins de France.

Visionné, la première fois, le 6 juin 1976 à la télévision à Montréal
Mon 132ème film visionné des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 28 décembre 2022

03 mai 2009

131. Clair : Le Million

1001 films de Schneider : Le Million
Retiré de la liste de Schneider en 2013.


Film français réalisé en 1931 par René Clair
Avec René Lefebvre, Annabella, Jean-Louis Allibert, Paul Ollivier, Vanda Gréville

Charmant, mignon, sentant le printemps, mais une comédie musicale du pauvre, quand même, surtout quand on sait ce qui se fait et ce qui se prépare, à ce moment-là, aux USA, côté comédies musicales (42nd Street, Footlight Parade, Gold Diggers of 33).

On peut aimer, mais pardi que ça fait piécette de salle paroissiale. Je sais, c'est du réalisme poétique. Mais me crée une grosse fatigue, le réalisme poétique. J'ai trop donné lors de ma tendre adolescence dans Cocteau et compagnie. Alors, maintenant autre chose.

Pourquoi donc Paris en carton-pâte ? D'accord, des décors magnifiques - les toits de Paris sont remarquables même si les cheminées tanguent dangereusement lors des poursuites. C'est un poème, ce décor. (Alexandre Trautner, le plus grand décorateur de cinéma s'y trouve à ses débuts). 

Mais peut-on vraiment ne pas être chagriné par toute cette vie parisienne qui se déroule en dehors des studios de Joinville-le-Pont (je crois) et qui nous échappe à jamais. Le Paris de 1930, mais si, on en veut.

Je suis en train de visionner les dix épisodes de la magistrale série de Louis Feuillade, Les Vampires, tournée en 1915 : un monument. Très surpris par la vivacité des différentes histoires. D'habitude, les films muets, sauf quelques trop rares exceptions, m'assomment d'ennui même si j'y trouve un certain plaisir intellectuel à découvrir l'histoire du cinéma en marche. Mais ici, chaque épisode nous réserve des surprises quant au déroulement de l'histoire, mais, surtout, ce qui surprend, plus particulièrement, c'est l'abondance des plans et des séquences tournés en extérieur.

Toujours Les Vampires. Pas de Paris en carton-pâte mais Paris live; entre autres, une séquence merveilleuse où l'on voit les personnages montés à Montmartre en passant près du Sacré-Cœur, avec en arrière-plan, Amélie Poulain (je vous jure!). J'aurais aimé que Carné emprunte la même voie pour Le Million au lieu de revenir au Paris de studio des débuts du cinéma.

Tiré de DVD Toile : "Quand sortit Les Temps modernes de Charles Chaplin, Tobis, le distributeur du film de René Clair voulut engager une action judiciaire pour plagiat. Le réalisateur ne souhaita pas s'y associer, déclarant que c'était pour lui un compliment si le film de l'artiste américain était inspiré du sien. L'affaire, plaidée en France et aux Etats-Unis, dura jusqu'à la veille de la Seconde Guerre mondiale. Sur la pression de ses avocats, Chaplin accepta une transaction. Lui et Clair restèrent amis."

Chaplin a piqué une autre idée de René Clair. La séquence de rugby sur la scène de l'Opéra se retrouve, presqu'à l'identique (un poulet au lieu d'un blouson), dans la scène de la salle de bal dans Les Temps modernes

Deux perles de René Clair :
1. Il prédit la fin du cinéma avec l'arrivée du parlant - difficile de se planter plus que ça.
2. Laurel et Hardy ? " Personne ne les trouve drôles, sauf le public. " 
Du pré-Yogi Berra. Vous ne connaissez pas ce fameux receveur des Yankees de New York des années 1950 ? C'est lui qui disait des trucs comme : "C'est pas fini tant que ce n'est pas fini". Ou bien "This place is too crowded, nobody goes there anymore".

Visionné, la première fois, le 2 juin 1976 à la télévision à Montréal
Mon 131ème film visionné des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 28 décembre 2022