04 janvier 2009

113. Pontecorvo : La Bataille d'Alger

1001 films de Schneider : La Bataille d'Alger


Film italo-algérien réalisé en 1965 par Gillo Pontecorvo
Avec Brahim Hadjadj, Jean Martin, Yacef Saâdi (rédacteur du récit à l'origine du film), Sarnia Kerbash

C'était le temps des certitudes pour les progressistes de ce monde.
D'un côté, un pays colonisateur, la France, qui n'hésite pas à se mettre à l'école nazie pour étouffer toute velléité d'indépendance politique.
D'un autre côté, un peuple dominé et exploité depuis plus d'un siècle, les Musulmans d'Algérie (Arabes et Berbères), qui essaie, avec des moyens restreints mais qui annoncent des décennies d'horreur, d'atteindre la libération politique. 
Alors, le choix était simple si on n'était pas Français. Vive l'Algérie. Mort aux colonialistes.

Quand j'ai vu ce film, la première fois, 10 années après sa réalisation, les choses étaient encore simples ; les Américains remplaçant les anciens colonialistes européens dans le rôle du méchant. Puis, au cours des décennies suivantes, les certitudes allaient se liquéfier surtout avec la découverte des catastrophes humanitaires de tous ces régimes qui nous promettaient des "lendemains qui chantent".

Lorsque j'ai vu La Bataille d'Alger, je connaissais peu de choses de la guerre d'Algérie; alors vous dire le choc reçu lors du visionnement de ce film. S'ensuivit un appétit insatiable pour tout ce qui concernait l'Algérie. Je me suis jeté sur l'œuvre d'Yves Courrière, La Guerre d'Algérie (4 tomes en livre de poche) que j'ai dévoré en quelques semaines. (On peut voir sur You Tube un documentaire de Yves Courrière intitulé La Guerre d'Algérie). Puis, un projet de voyage en Algérie prit forme.

Pendant l'été 1977, avec ma conjointe, nous sommes partis pour Paris où nous avons loué une voiture puis, après avoir traversé la France, l'Espagne et le nord marocain (le superbe Rif) nous avons parcouru tout le nord de l'Algérie pendant deux semaines (limite du visa) : peu de touristes, un accueil sympathique, le Sahara, l'Aurès (découverte du chanteur Idir, inoubliable A Vava Inouva, sur les bords d'un oued), la Kabylie, Oran, la Casbah d'Alger, visitée avec un moudjahidine à la retraite.

Le film : la guérilla urbaine, mode d'emploi.
Utilisé à titre de formation politique par des groupes aussi divers que les Black Panthers, l'IRA irlandaise, la Bande à Baader et même le Pentagone. Ce dernier organisa une projection pour son Directorate for Special Operations le 27 août 2003.
Un document accompagnant cette projection se lisait comme suit :
"How to win a battle against terrorism and lose the war of ideas. Children shoot soldiers at point-blank range. Women plant bombs in cafes. Soon the entire Arab population builds to a mad fervor. Sound familiar ? The French have a plan. It succeeds tactically, but fails strategically. To understand why, come to a rare showing of this film."

Le film que la France ne voulait pas voir
Le gouvernement français a tout fait pour empêcher, sans succès, que ce film fasse partie de la sélection officielle du Festival de Venise de 1966.

Un extrait d'une chronique de mon critique préféré, Jean-Louis Bory, publié dans le Nouvel Observateur du 14 septembre 1970 :
" On mesure la stupidité de l'interdiction qui pèse depuis 1966 sur ce film. Il faut avoir la cervelle coincée par une médaille militaire ou par des nostalgies compréhensibles mais désormais anachroniques pour étiqueter ce film comme francophobe. "

Banni pendant 5 ans en France, ce n'est qu'en 1971 qu'il a pu être visionné grâce aux efforts de Louis Malle.

À quand des films français critiques sur la guerre d'Algérie équivalents à ceux que les Américains ont réalisé sur la guerre du Vietnam ? À quand un Né un 1(4) juillet ou autre Platoon ? Ils me semblent assez discrets, les producteurs et les réalisateurs français au sujet de cette époque sombre de l'histoire de France.

Un film de Laurent Heinemann, La Question, traitant de la torture pratiquée pendant la guerre d'Algérie et tiré du livre d'Henri Alleg, réalisé en 1977, est-il accessible en France ?

" Dans La Question, Henri Alleg raconte sa période de détention et les sévices qu'il y subit, en pleine guerre d'Algérie. Tout d'abord publié en France aux Éditions de Minuit, l'ouvrage est immédiatement interdit. Nils Andersson le réédite en Suisse, quatorze jours après l'interdiction le frappant en France en mars 1958. Malgré son interdiction en France, ce livre contribue considérablement à révéler le phénomène de la torture en Algérie " Wikipédia.

Critique. Cahiers du Cinéma. Octobre 1966. Numéro 183. Par Jean Narboni
Les 300 premiers numéros des Cahiers du Cinéma sur Archive.org

Venise 1966. Lion d'or, prix de la ville de Venise, prix de la critique internationale.

Visionné la première fois le 13 octobre 1975 à la télévision à Montréal
Mon 113ème film visionné des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 26 février 2023