14 avril 2008

84. Malle : Le Souffle au cœur

1001 films de Schneider : Le Souffle au cœur


Film français réalisé en 1971 par Louis Malle
Avec Léa Massari, Benoit Ferreux, Daniel Gélin

Coup de tonnerre dans les chaumières.
Malgré sa sortie en pleine révolution sexuelle du début des années 70, ce film a quand même créé un émoi certain chez beaucoup de spectateurs. Non seulement, l'inceste y est-il évoqué mais, de plus, l'auteur n'y apporte aucun jugement moral, comme si ce n'était pas un des plus grands tabous de la civilisation occidentale. 
Il faut dire que le glissement vers la relation incestueuse apparaît au spectateur comme l'aboutissement normal de la tendresse mère-enfant qu'on peut rencontrer habituellement dans une famille pas trop dysfonctionnelle. Si, en plus, la mère est la superbe Léa Massari, alors là, les tabous fondent dans ses yeux en amande comme neige au soleil qui, soit dit en passant, tarde à faire disparaître les congères accumulées dans ma cour arrière (encore 2 mètres de neige à certains endroits, on rigole pas!).

Avant la sortie du film, quelques remous au cœur de l'administration française : censurer ou non ce film. En tout cas, on l'empêchera d'être sélectionné pour représenter la France au Festival de Cannes de 1971.

Extrait des documents de Cannes 1971 : "Louis Malle aborde l’inceste. Le film est défendu par des artistes comme Jeanne Moreau, John Lennon et Milos Forman. Il ne sera pas censuré, ni primé. Juste un haut-le-coeur passager..."

Si la première partie du film (avant le séjour à l'Hôtel des Bains) nous donne le goût de hurler : "Pas encore un film d'ado !!!," la deuxième partie, toute proustienne (on pense souvent au séjour du narrateur à Balbec dans À l'ombre des jeunes filles en fleur), nous amène dans le confort douillet des ambiguïtés des premiers émois amoureux.

Malgré le lieu, Dijon, et l'année, 1954, c'est vraiment un extrait autobiographique authentique que nous présente Louis Malle, à l'exception de la scène de l'inceste, dit-il.

Beaucoup de références littéraires tout au long du film :
Boris Vian, J'irai cracher sur vos tombes
Saint-Exupéry, Le petit prince
Henry de Montherlant, Les jeunes filles
Goethe, Le roi des aulnes
Proust, l'œuvre en général
Tintin
Albert Camus, L'état de siège 
et la grande surprise : Pauline Réage (Dominique Aury, née Anne Desclos), Histoire d'O qui venait de paraître.

Lecture cinéphilique : La folle vie de Woody Allen par Marion Meade.
Habituellement, je ne raffole pas tellement des biographies, leur préférant, et de loin, des écritures du côté de l'autofiction : journaux, carnets, mémoires. Pour vous dire cette passion, j'ai lu dans la dernière décennie Le Temps immobile de Claude Mauriac, pas une mince affaire que cette recherche du temps perdu en 6000 pages; mais un immense voyage émouvant à travers le siècle.

Critique. Cahiers du Cinéma. Juillet 1971. Numéro 230. Le Souffle au cœur par Jean-Pierre Oudart.
Les 300 premiers numéros des Cahiers du Cinéma sur Archive.org

Visionné, la première fois, le 17 novembre 1971 au cinéma Empire à Québec
Mon 84ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 21 janvier 2023