27 décembre 2007

65. Costa-Gavras : Z

1001 films de Schneider : Z



Film franco-algérien réalisé en 1969 par Constantin Costa-Gavras
Une équipe de production de rêve :
Avec Yves Montand, Irène Papas, Jean-Louis Trintignant, Jacques Perrin, Charles Denner, François Perrier, Bernard Fresson, Pierre Dux, Magali Noël, Renato Salvatori, Marcel Bozzuffi.
Scénario : Jorge Semprun tiré du roman éponyme de Vassilis Vassilikos.
Caméra : Raoul Coutard
Musique : Mikis Theodorakis

Sujet : L'assassinat de Grigoris Lambrakis, député grec.

Grigoris Lambrakis (1913-1963), fut élu au parlement grec en 1961 sous une bannière de gauche. Il a été activement impliqué dans les mouvements pacifistes pour le désarmement nucléaire et pour le démantèlement des bases militaires américaines en Grèce. Sa vie fut souvent menacée à cause de ses déclarations pacifistes. Son assassinat et l'enquête qui s'ensuivit sont fidèlement racontés dans le roman de Vassilikos et le film de Costa-Gavras.
Grigoris Lambrakis, pendant une marche (de Marathon à Athènes) pour la paix, interdite par les autorités, un mois avant son assassinat le 22 mai 1963 à Salonique

Comment évaluer ce film? Ambivalence certaine.

Pour. À l'époque, je n'ai eu aucun doute. Film politique majeur qui traite enfin des atteintes aux libertés fondamentales dans les régimes démocratiques. Ce film avait une valeur universelle; ce qui s'était passé en Grèce en 1963 lors de l'assassinat de Grigoris Lambrakis pouvait se passer dans une démocratie près de chez-nous et se passait régulièrement dans nombre de pays d'Amérique latine.

J'avais été secoué émotionnellement par ce film. Je me souviens que, pendant des jours, il fut au cœur de mes conversations et il participa à maintenir ma ferveur dans mes positions politiques : contre les Américains au Vietnam, contre l'impérialisme américain en Amérique latine, pour toutes les luttes syndicales, pour l'indépendance du Québec et, à la limite, pour les moyens violents d'y arriver.

         Troublant.

Pendant que je rédige ce message, j'apprends l'assassinat de l'ex-première ministre du Pakistan, Benazir Bhutto, dans des circonstances qui rappellent l'élimination de Grigoris Lambrakis; c'est-à-dire qu'elle a, probablement, été assassinée par un groupe d'extrême-droite (islamistes fondamentalistes) avec le soutien de certains éléments de l'armée pakistanaise.
Contre. Ce qui est agaçant dans ce film qui se veut politique c'est justement qu'il dépolitise cet assassinat en ne s'attardant qu'au strict déroulement de l'enquête judiciaire sans mise en contexte. Cet assassinat a eu des répercussions énormes sur la société civile mais le réalisateur décide d'ignorer tout cet aspect. Il préfère montrer l'histoire de la victoire éphémère des forces du bien (le jeune procureur,Trintignant, le journaliste, Perrin) contre les forces du mal (la police et les militaires).

Ce qui est agaçant également :
Son côté tape-à-l'oeil. Exemple : Perrin et sa superbe Nikon automatique, l'aura-t-on vu celle-là!!!, à croire que Nikon a commandité ce film. Champion du placement de produit.

Les "méchants" ont l'air de sortir d'une mauvaise bande dessinée : la scène de l'inculpation des militaires; la scène de l'hôpital où l'on voit un type, une jambe dans le plâtre, se baladant avec un gourdin pour assommer un pauvre type qui a un sac de glace sur la tête. Ces scènes hilares et grotesques sont à contretemps avec la gravité du sujet abordé. Je pourrais multiplier les exemples de ce type de scènes.

Mais basta la critique et passons à cette partie de mes messages qui me passionne plus, celle qui traite d'éléments réels liés à la fiction du film.

On retrouve dans le film le fameux symbole de la paix, le fameux "Peace" qui représentait la lutte pour le désarmement nucléaire. Il devint, par la suite, l'emblème de tout le mouvement de la contreculture de la fin des années 1960.
Ce symbole a été élaboré en 1958 par Gerald Holtom, un designer britannique, suite à une commande du CND (Campaign for Nuclear Disarmament) et fut importé aux USA en 1960 par des membres du Student Peace Union qui avait assisté à des manifestations contre des sites nucléaires britanniques.
Le symbole est une combinaison des 2 signaux de sémaphores représentant les lettres N et D, abréviations de Nuclear Disarmament. La lettre N est formée en tenant deux drapeaux sous la forme d'un V inversé et la lettre D, en tenant un drapeau vers le haut et un drapeau vers le bas.


Citation tirée du film qui résume bien l'idéologie anti-américaine qui aura tant de belles années, décennies, devant elle. Le personnage joué par Charles Denner : "Il faut toujours s'en prendre aux Américains même quand on pense avoir tort; eux savent qu'on a raison". 

Ah oui! Z signifie "il est vivant" en grec ancien. Lors de la prise du pouvoir par la junte militaire en 1967, on a décrété l'interdiction de la lettre Z dans les lieux publics.

Critique. Cahiers du Cinéma. Mars 1969. Numéro 210. Le Pyrée pour un homme par Jean Narboni.
Les 300 premiers numéros des Cahiers du Cinéma sur Archive.org

Oscars 1970. Montage et meilleur film en langue étrangère.
Cannes 1969. Prix du jury et prix du meilleur acteur à Jean-Louis Trintignant

Visionné, la première fois, en janvier 1970 au cinéma Empire à Québec
Dans l'ambiance de Z. Grosse année qui se prépare pour le Québec: premiers élus indépendantistes au gouvernement du Québec en avril mais, surtout, la Crise d'Octobre : le FLQ frappe fort et le gouvernement fédéral de Pierre Elliott Trudeau suspend certaines libertés civiles en votant la loi sur les mesures de guerre.
Pour moi, fin de ma carrière (2 ans!!, c'est pas sérieux!) d'enseignant au niveau Secondaire et retour aux études en licence de Géographie à l'université Laval de Québec.
Mon 65ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 18 janvier 2023

23 décembre 2007

64. Ford : The Man Who Shot Liberty Valance

1001 films de Schneider : The Man Who Shot Liberty Valance
L'Homme qui tua Liberty Valance


Film américain réalisé en 1962 par John Ford
Avec John Wayne, James Stewart, Vera Miles et Lee Marvin

Je sais. John Ford est un des plus grands réalisateurs américains. Je sais. The Man Who Shot Liberty Valance est souvent classé dans la liste des 100 meilleurs films. Mais rien n'y fait. Je trouve ce film vieilli et redondant tant par le sujet traité que par sa forme conventionnelle.

Sujet déjà traité par des films tels que High Noon de Fred Zinneman et Mr. Smith Goes to Washington de Frank Capra.

Forme conventionnelle : comment peut-on, en 1962, encore tourner en studio une scène d'attaque de diligence ?

Et John Wayne, vieilli, trop vieux pour ce rôle, perdu, dans ce film au verbiage pédagogique.

Un James Stewart, trop vieux pour son rôle de jeune avocat débutant, en train de répéter son rôle pour le film Mr. Smith Goes to Washington, pourtant tourné 23 ans auparavant.

Le contenu pédagogique du film, lourdement souligné, nous ramène pratiquement au cinéma des années 1930.

C'est la fin d'une époque. Les vieux spécialistes du western font leur dernier tour de piste. À l'horizon, Sergio Leone est en train de préparer ses westerns spaghettis : le western ne sera jamais plus le même.

Je n'avais pas encore vu les westerns de Leone qui allaient réhabiliter à mes yeux cette catégorie de cinéma. Mais, à cette époque effervescente sur le plan politique (post-mai 68, arrivée du Parti Québécois à l'assemblée nationale du Québec, crise d'Octobre 1970), pendant laquelle je ne m'intéressais qu'au cinéma à contenu politique, les vieux westerns traditionnels à la Ford-Wayne ne trouvaient aucune grâce à mes yeux. Ils étaient d'une époque révolue.

En 1962, nous sommes, aux USA, au milieu de la grande période de la défense des droits civiques des Noirs. Bob Dylan, Joan Baez, Pete Seger, entre autres, seront de célèbres porte-paroles de cette lutte lors de spectacles et, plus particulièrement, lors du Newport Folk Festival.

John Ford était conscient de ce mouvement en faveur des droits civiques. À un certain moment dans le film, Woody Strode , acteur Noir, (voir sa biographie remarquable quant à la lutte contre les barrières raciales) qui interprète le rôle de Pompey dans le film de Ford récite le 1er amendement de la constitution des USA dans lequel il est spécifié que tous les hommes sont égaux. On était loin du compte. À l'époque pendant laquelle se déroule l'action du film (1900-1910), on est loin de l'égalité entre Noirs et Blancs ou bien, comme on le constate plus loin dans le film lors de la période de votation, entre hommes et femmes. Comme dirait George Orwell, "tous les humains sont égaux mais il y en a certains qui sont plus égaux que d'autres".

Critique. Cahiers du Cinéma. Novembre 1962. Numéro 137. L'Amérique par excellence par Claude-Jean Philippe.
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Visionné, la première fois, en 1970 à la télévision à Québec
Mon 64ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 18 janvier 2023

12 décembre 2007

63. Whale : Frankenstein

1001 films de Schneider : Frankenstein


Film américain réalisé en 1931 par James Whale
Avec Colin Clive, Mae Clarke, John Boles et Boris Karloff

Trop de placotage, pas assez de monstre. Tout ce qui m'intéressait dans ce film, c'était Frankenstein. La mise en place de l'intrigue sans le monstre est longue, maladroite et pénible.

De plus, il me semble qu'il y a eu une erreur de casting : Colin Clive, 31 ans, aux allures d'agent immobilier, n'a aucune crédibilité en docteur Frankenstein. Quand on sait que Bela Lugosi (Dracula, 1931) avait été approché pour jouer ce rôle, on ne peut que regretter ce rendez-vous manqué entre Dracula et Frankenstein.

Bela Lugosi

Deux scènes valent à elles seules le visionnement de ce film plutôt mal fait :
1. La rencontre émouvante entre le monstre et la petite fille au bord du petit lac.
2. La scène finale où le monstre et son maître périssent dans l'incendie et l'écroulement du moulin. Deux ans plus tard, le gros singe King Kong va s'inspirer de cette scène et la transposer au cœur de New York en s'attaquant à son grand moulin, l'Empire State Building.

On s'imagine que la carrière de Boris Karloff a commencé avec sa personnification de Frankenstein tant sa carrière a été marquée par des rôles de monstre. En fait, il avait déjà joué dans 77 films lorsqu'il fut engagé, à 44 ans, pour personnifier Frankenstein dans le film de Whale.

Boris Karloff

Critique. Cahiers du Cinéma. Aout 1958. Numéro 86. Adieu Frankenstein par Ferydoun Hoveyda.
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Venise 1932. Prix du public

Visionné, la première fois, en 1970 à la télévision à Québec
Mon 63ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 18 janvier 2023

10 décembre 2007

62. Bergman : L' Heure du loup

1001 films de Schneider : L'Heure du loup


Film suédois réalisé en 1968 par Ingmar Bergman
Avec Max von Sidow (Johann), Liv Ullmann (Alma), Erland Josephson, Georg Rydeberg et Ingrid Thulin.

Bienvenue dans la période la plus noire du cinéma de Bergman.
Un film-cauchemar, un film d'horreur, un film gothique avec des monstres, des démons et des vampires.

Isolé avec sa femme sur une île de la mer du Nord, on assiste à la lente désintégration psychologique d'un artiste-peintre. Sa peur de la nuit et son angoisse face à l'aube qui pourrait ne jamais arriver détruit progressivement tous ses repères avec la réalité. 

Un monde parallèle s'échafaude; un monde hallucinatoire, cauchemardesque, habité par des aristocrates qui s'avèrent être, finalement, des démons et des monstres : Une schizophrénie en marche.

Axel Fridell, peintre suédois (1894-1935). Le Vieil antiquaire.
Ce tableau a inspiré Bergman pour plusieurs des scènes ésotériques du film.

"L'heure du loup, c'est l'heure où la nuit fait place au jour, c'est l'heure où la plupart des mourants s'éteignent, où notre sommeil est le le plus profond, où nos cauchemars sont les plus réels. C'est l'heure où celui qui n'a pu s'endormir affronte sa plus violente angoisse, où les fantômes et les démons sont au plus fort de leur puissance." Tiré du "pressbook" du film. (Cahiers du Cinéma d'août 1968, numéro 203)

"L'heure du loup" : J'ai toujours beaucoup aimé parler de cette expression lors de conversations qui touchaient aux rapports que nous avons avec la nuit. Elle crée un petit effroi dans le cercle des auditeurs parce qu'elle nous renvoie invariablement aux grandes angoisses qui sommeillent (si je puis utiliser cette expression) en nous.

L'angoisse qui monte chez l'insomniaque qui sent l'aube approchée sans avoir encore fermer l'œil est une épreuve difficile à soutenir. Elle mène souvent à l'épouvante. Cette épreuve que Bergman a souvent éprouvée au cours de sa vie, il réussit à la traduire parfaitement dans son film.

Mes scènes préférées : les moments qui précèdent l'aube où l'on voit Johan rongé par l'angoisse, au bord de la crise psychotique et Alma qui tente de ne pas sombrer à son tour dans l'abime. Une scène, en particulier, est troublante tant elle est anxiogène : l'éternité que représente le passage d'une minute.

L'acteur Georg Rydeberg, sosie de Bela Lugosi (le plus célèbre vampire de l'histoire du cinéma) incarne à la perfection un vampire.

Dans le numéro des Cahiers du Cinéma d'août 1968, il y a un très long entretien avec Ingmar Bergman autour de L'Heure du loup, intitulé La mort à chaque aube. Entre autres choses, il explique sa pratique "déconstructiviste" dont j'ai parlée dans un texte précédent (60. Anderson : If). Il fait remonter cette technique à Un Été avec Monika (1953), film-phare pour les futurs cinéastes de la Nouvelle Vague

Il s'agit de créer chez le spectateur une ambivalence : dès qu'il s'identifie à l'action ou aux personnages du film, on le replonge dans sa réalité de spectateur de cinéma en mettant sur l'écran des images ou des sons qui lui montrent qu'on est en train de fabriquer un film. Bergman: "J'ai découvert qu'un film ne souffre absolument pas de ce que l'on brise l'illusion, de ce que l'on contrarie la disposition des gens à se laisser illusionner pour les renvoyer face au cinématographe. C'est excellent de réveiller le public un bon coup, pour ensuite le plonger à nouveau dans le drame. Pour cette même raison, je répète le titre, "L'heure du loup", au milieu du film."

Pas le meilleur film pour s'initier à l'œuvre de Bergman. Allez voir plutôt du côté de Le Septième sceau, Les Fraises sauvages ou bien La Source. Mais, évidemment, ce qui est le plus passionnant c'est de s'attaquer à l'intégrale Bergman en suivant la progression chronologique de la production.

J'ai déjà trois intégrales Bergman à mon crédit. La première (une mini-intégrale de 20 films), à jamais tatouée sur mon cœur, a eu lieu au cinéma St-André-des-Arts sur la rue du même nom à Paris à l'automne 1988, lors d'une période sabbatique passée à Paris. La deuxième, plus prosaïquement, chez-moi à Montréal, en format DVD et VHS, à l'automne 2005. Puis une troisième, avec un copain, la vraie intégrale de 43 films, entre 2020 et 2022.

Critique. Cahiers du Cinéma. Juin-Juillet 1968. Numéro 202. Par Jacques Aumont
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Visionné, la première fois, le 17 octobre 1969 à la télévision à Québec
Dans l'actualité du Jour : "Saint-Laurent-des-Eaux (Loir-et-Cher, France). Fusion de 50 kg d'uranium lors d'une opération de chargement du réacteur graphite-gaz Saint-Laurent 1 (480 MW). La contamination serait restée limitée au site. Plus d'un an de réparations." En cette période où les grands vilains sont les gaz à effet de serre, ne pas oublier le piège peu médiatisé du nucléaire.
Mon 62ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 18 janvier 2023

05 décembre 2007

61. Welles : Falstaff

1001 films de Schneider : Falstaff



Film espagnol réalisé en 1965 par Orson Welles 
Avec Orson Welles, Keith Baxter, Jeanne Moreau, Margaret Rutherford, John Gielgud, Marina Vlady, Norkman Rodway, Walter Chiari, Michael Aldridge, Alan Webb et Beatrice Welles (10 ans) la fille d'Orson Welles.

J'ai écouté ce film en version originale anglaise avec sous-titres en anglais. Je lis parfaitement l'anglais mais je comprends l'anglais shakespearien. En fait je n'ai rien compris aux dialogues de ce film très théâtral si l'on excepte les scènes de bataille, parmi les plus sombres qu'il m'ait été donné de voir.

Déjà, les pièces de Shakespeare en français au cinéma m'amène dans mes dernières extrémités au niveau de la compréhension du texte, alors, imaginez mon désarroi devant cette mixture de Henry IV, Henry V, Richard III et les Joyeuses Commères de Windsor réunis dans ce Falstaff.

En 1939, Welles avait écrit Five Kings, une pièce de théâtre dans laquelle apparaissait cette histoire de John Falstaff, personnage créé par Shakespeare. C'est à partir de cette pièce qu'il a construit le scénario du film.

Histoire d'amour improbable entre un homme de 50 ans, bouffon, gourmand, menteur et le jeune prince de Galles qui à son investiture en tant qu'Henry V, le rejettera.


Critique. Cahiers du Cinéma. Aout 1966. Numéro 181. Welles au pouvoir par Serge Daney.
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Cannes 1966. Prix du 20ème anniversaire et Grand prix technique.

Visionné, la première fois, le 2 octobre 1969 au théâtre L'Estoc à Québec


Mon 61ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 19 janvier 2023

03 décembre 2007

60. Anderson : If...

1001 films de Schneider : If..



Film anglais réalisé en 1968 par Lyndsay Anderson
Avec Malcolm McDowell, David Wood, Richard Warwick, Christine Noonan et Robert Swann.

Tourné peu après Mai-68 et les grandes manifestations étudiantes en Occident, If est un des films les plus représentatifs de cette période de bouillonnement contestataire de la jeunesse occidentale. 

Cette contestation qui semblait être, à son départ, un grand chambardement de la société occidentale, ne devait s'avérer finalement qu'être un coup de gueule typique de la crise d'adolescence d'une société en mutation. Bon, d'accord, je simplifie un peu. Mais le parallèle entre le film traitant de la rébellion justifiée d'un petit groupe d'étudiants et cette période de contestation est trop évident pour ne pas céder à la tentation de faire ce raccourci.

À part quelques dérives surréalistes, si appréciées des adolescents, le film est d'un réalisme implacable. Le déroulement chronologique de l'histoire est d'une telle rigueur que la fin nous apparaît comme un ovni provenant d'un film tourné dans les années 1990 dans une quelconque école secondaire américaine (ça c'est un cliché, les USA n'ayant pas l'exclusivité de ces massacres; toujours se souvenir des femmes massacrées le 6 décembre 1989 à l'école Polytechnique de Montréal).

La rébellion attendue des étudiants est d'une telle ampleur que l'horreur qu'elle avait créée chez les spectateurs de l'époque fait plutôt sourire aujourd'hui tant les ficelles de la manipulation du réalisateur sont apparentes. Il voulait créer un émoi dans cette société britannique si conservatrice. Il y a réussi au-delà de toute espérance, le film ayant obtenu le "X certificate", fusée qui fit de ce film un des plus grands succès commerciaux de l'histoire du cinéma britannique. Et, évidemment, on ne pouvait y échapper, il est devenu, de ce fait, un film-culte.

Film-culte : valise fourre-tout dans laquelle se retrouvent des films qui ont en commun leur immunité face à la critique. On y trouve du meilleur et du pire (les films d'Edward Wood). On en est à 759, rien que çà, sur le site AlloCiné.

On retrouve, comme dans Les Petites marguerites de Vera Chytilova l'alternance entre la couleur et le noir et blanc, apparemment parce qu'il n'y avait plus d'argent (des "on-dit" de critiques) pour acheter de la pellicule couleur avant la fin du tournage mais probablement plus pour se conformer à une certaine tendance populaire à cette époque du cinéma d'art et d'essai qu'on pourrait appeler le déconstructivisme, pleinement illustré dans Persona de Bergman. Il s'agissait de rappeler constamment aux spectateurs le caractère artificiel du cinéma, son aspect "produit industriel" en semant tout au long du film des éléments qui nous rappellent que nous sommes des spectateurs et que nous n'appartenons pas à la réalité du film.

Malgré tout ce que j'ai dit précédemment, j'ai adoré ce film. Ce film traverse le temps d'une manière remarquable si l'on fait exception de certaines séquences, peu nombreuses il faut l'avouer, qui nous rappellent cette période du "pouvoir des fleurs" où l'onirisme, l'ésotérisme et le surréalisme imprégnaient une grande partie de la production artistique.

Le souvenir que j'en gardais était assez horrible. Le contexte dans lequel je l'ai vu, la première fois, est responsable de cette perception.

Je commençais ma deuxième et dernière année d'enseignement à titre de professeur de Géographie dans une école secondaire (école pour les 12-16 ans) de la région de Québec et j'étais très malheureux. On m'avait confié des classes de Secondaire III (14 ans). Deux semaines, à peine, après le début des classes, j'étais immergé par les problèmes de gestion de classe : indiscipline, violences verbales, confrontations avec certains élèves délinquants.  La routine typique de l'enseignement dans une école secondaire, quoi. Les trois délinquants du film d'Anderson me replongeaient dans les affres de ma vie quotidienne. En conséquence, j'ai longtemps gardé une certaine appréhension illogique vis-à-vis les films où l'on retrouvait Malcolm McDowell; et deux ans plus tard, A Clockwork Orange n'allait certainement pas arranger les choses.

Cannes 1969 : Palme d'or

Visionné, la première fois, le 11 septembre 1969 au cinéma Empire à Québec
Dans l'actualité du jour :
"La projection du film Z du réalisateur français Costa-Gavras a été marquée hier soir par des incidents dans plusieurs salles parisiennes. Des engins fumigènes ont été lancés entraînant l'interruption de la projection dans 4 cinémas." (Journal L'Action, de Québec).
Des groupes de droite ont revendiqué cette action en contrepartie des actions de groupes de gauche qui perturbaient, depuis le début de l'année, la projection du film de John Wayne, Les Bérets verts, justifiant l'intervention des USA au Vietnam.
Mon 60ème film visionné de la liste des 1001 films du livre de Schneider
Mis à jour le 17 janvier 2023